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« Les Luminaires » d’Eleanor Catton

Les LuminairesCela faisait un bon moment que je n’avais pas posté ici… il faut dire que j’ai été happée par le pavé Les Luminaires. Et quel pavé ! Plus de 1200 pages d’intrigues et de mystères, en pleine Nouvelle-Zélande du 19ème siècle, lors de la ruée vers l’or.

En 1866, Walter Moody arrive dans la ville côtière d’Hokitika en Nouvelle-Zélande. Il a abandonné l’Angleterre pour y faire fortune en cherchant de l’or, comme des milliers d’autres avant lui. Alors qu’il compte se reposer après un voyage en mer exténuant, il se retrouve au milieu d’un conseil secret tenu par douze hommes. Leur objectif est découvrir ce qu’il est advenu d’Emery Staine, un riche chercheur d’or porté disparu, et à partir de là dénouer les fils de mystères survenus dans la ville : pourquoi la prostitué Anna a été retrouvée inconsciente au milieu de la route une nuit, comment Crosbie Wells l’ermite a trouvé la mort, est-ce que le capitaine Carver à quelque chose à voir dans les malheurs qui les frappent tous un par un… D’oreille attentive, Moody va devenir un acteur de ces intrigues.

Difficile de résumer ce roman complexe, qui est presque cousu à la main. L’auteur part sur une construction en forme de thème astral, où chaque personnage récurrent est assimilé à un signe astrologique. Je n’ai pas totalement saisi les tenants et aboutissants de cette structure, mais ce qui est certain, c’est que la destinée et sa roue ont fort à faire dans ce récit. Si le destin se joue de beaucoup des personnages et est parfois cruel en créant des interactions complexes, des effets de chaînes… il peut aussi être bénéfique pour d’autres : fortune, amour, renommée… En cela, on a l’impression que les personnages sont les proies de dieux funestes, nichés au milieu des constellations et des astres.
Bref, les histoires de tous les acteurs de cette histoire se trouvent liées, et nous allons découvrir comment au fur et à mesure que nous tournons les pages. 

Je dois avouer que les 300 premières pages m’ont laissées un peu perplexe. Je me demandais où tout cela aller mener. Mais finalement on se laisse rapidement prendre par la magie de l’écriture, des personnages, et aussi de la Nouvelle-Zélande encore sauvage, la dernière frontière ! On est plongé dans un univers qui rappelle le Far-West, mais au bord de la mer, avec ses castes et clans en fonctions de leurs origines, leurs niveaux social, leur professions…

Une belle découverte en somme. Je ne regrette pas d’avoir passé un mois à le lire tranquillement, à mon rythme…
Merci à Folio pour ce partenariat !

« Gorilla Man » de Robert Graysmith

Gorilla manVoilà un petit moment que je n’ai pas publié de post, vacances obligent ! Avant de partir j’ai reçu pour le partenariat Denoël Gorilla Man, de Robert Graysmith… Celui là même qui a écrit Zodiac. Comme j’aime bien les histoires de serial-killer, je ne me suis pas posée de questions en choisissant ce livre, qUi m’a donc accompagné en vacances au Japon !

Dans les années 20 et 30, un homme à l’allure de gorille, sème la mort à San Francisco. Ses bras longs, ses mains immenses, son dos voûté, et son rire nerveux inoubliable vont hanter la cité californienne, puis le reste des Etats-Unis. Malgrè les meilleurs policiers et technologies pour le traquer, il va rester de longues années en liberté pour commettre ses crimes. Les choses deviennent plus difficile quand on s’aperçoit que le Gorille a fait des petits : plusieurs hommes correspondants à la description physique du Gorille surgissent et laissent derrière eux des victimes, toutes tuées de manière effroyable. Dans une ville rongée par la corruption de la Police, les forces de l’ordre arriveront-elles à résoudre l’énigme de l’identité du Gorille ?

Pas de doute, on est bien dans une enquête ultra documentée, comme Zodiac (que je n’ai pas lu). Histoire de me remette l’histoire en tête, je l’ai regardé dans l’avion à mon retour de vacances : malgré un fond passionnant, je lui trouve les mêmes défauts que Gorilla Man et j’ai un peu mieux compris ce qui me gênais dans ce livre.

Le problème majeur est que même s’il est en parti construit et traité comme tel,  cet ouvrage n’est définitivement pas un roman. Par exemple les personnages sont un peu travaillés pour nous les rendre sympathiques, comme l’enquêteur principal Dullea, mais ils ne sont pas spécialement des protagonistes centraux. Ils vont en viennent. Par moment on commence à accrocher sur l’histoire et les traits d’un tueur… mais c’est fugace, car ils défilent à une vitesse écoeurante. Bref, dans le récit on tarde à avoir l’apogée, le climax. On croit que ça arrive… mais non. Et puis sans vouloir trop en dévoiler, j’ai aussi été assez déçue de la fin, qui tombe un peu comme ça.

L’auteur est exigeant avec ses lecteurs, il faut rester concentrer sur les dates, les recoupements… Pas évident quand on a pas des heures devant nous pour lire d’une traite. Il nous brosse un tableau du San Franciscso des années 20 avec les meurtres qui ont fait les gros titres de l’époque, les systèmes de corruption mis en place dans la police, le plan du quartier du port quand la ville n’était pas reliée au continent… C’est bien pour se mettre dans le bain, mais très long, surtout au début de la lecture du livre. Ca m’a donné comme un effet de trame décousue.  J’ai donc eu beaucoup de mal à avancer, et il m’a fallut la perspectives de dizaines d’heures de voyage pour enfin terminer ce livre.

Bref, je suis pas hyper emballée même si je reconnais à l’ouvrages des qualités d’écriture, de documentation, d’enquête… Mais je pense que ce genre n’est pas fait pour moi ! Merci tout de même à Denoël pour le partenariat !

Gorilla Man de Robert Graysmith
Traduit par Emmanuel Scavée
Collection True Crime – 464 pages
Paru le 15 octobre 2015

« L’Accusé » de John Grisham (Etat de l’Oklahoma)

Je n’avais jamais lu de romans de John Grisham avant celui-ci, mais sa réputation le précédant, j’ai tout de suite sauté sur l’occasion quand je me suis aperçue que L’Accusé se déroulait en Oklahoma ! Parfait pour le challenge « 50 états, 50 billets » ! Basé sur des faits réels, ce livre me donne aussi l’occasion de découvrir un genre dont je suis peu coutumière : le thriller judiciaire, thème cher à Grisham, qui a lui même été avocat au début de sa carrière !
L’Accusé est loin d’être son premier roman : on lui doit La Firme, L’affaire Pélican, … mais L’Accusé édité en 2006 est son premier livre enquêtant sur un procès ayant eu réellement eu lieu.

En 1982, à Ada, Oklahoma, Debbie Carter est découverte morte, violée, battue… dans son appartement. Dès lors, la police d’Ada prend l’affaire en main pour découvrir qui aurait bien pu commettre ces atrocités… Et assez rapidement, un suspect semble attirer leur attention : Ron Williamson, ex-étoile du base-ball local, fêtard devenu alcoolique et ayant quelques problèmes psychologiques… et vu la violence relevée sur la scène de crime, la police pense qu’ils étaient deux tueurs. Le compagnon de viré de Ron, Dennis Fritz, fera tout à fait l’affaire ! Mais les deux hommes ont beau clamer leur innocence, rien n’arrêtera la machine judiciaire !
Le livre revient sur l’enquête bâclée, orientée pour faire accuser deux suspects plutôt que de découvrir le vrai coupable, le procès à charge mené par un procurer arrogant et un juge incompétent.

Comme beaucoup de récits qui mettent en scène des innocents injustement accusés, ce livre est révoltant ! A se dire qu’aux USA, les gens doivent bien flipper lorsqu’ils sont emmenés pour être interrogé dans le cadre d’une enquête, vu les échantillons corrompus que Grisham nous présente ici ! Surtout avec la peine de mort au bout comme ici !
John Grisham n’y va pas de main morte pour pointer les dysfonctionnement dans la ville d’Ada, surtout quand on apprend que tous les noms sont les vrais noms des protagonistes, sauf ceux de quelques victimes. De quoi mettre l’ambiance dans la ville lors de procès, ou dans les cellules de prisons en ce qui concerne les mouchards ayant menti sur l’affaire et les deux accusés.

Ce livre est vraiment prenant et palpitant, même si au final on sort plus avec une grosse bouffées d’angoisse sur le thème de l’injustice ! Jusqu’au bout on se demande si Ron et Dennis vont s’en sortir, ainsi que quelques compagnons d’infortune dans le même cas qu’eux : accusés à tort.
Grisham détaille bien les faits, rend le vocabulaire juridique accessible, organise le récit  pour nous les rendre plus clairs, comme si nous étions assis au milieu du jury chargé de statuer une fois de plus sur le sort des deux accusés. De quoi se sentir bien impliqué !

Une lecture sympa, si je puis dire, qui a le mérite de montrer un autre visage des USA… Pour découvrir un peu mieux Grisham, je pense que je me tournerai vers un autre de ses best-seller, une fiction cette fois, comme L’associé !

A lire ce roman, on aurait tendance à croire que l’Oklahoma est un repère d‘ultra catholique fans de sports et de picole,  incompétents dans les domaines judiciaires et dont la police est totalement corrompue… Une vraie Amérique de série TV quoi !
Bien entendu ce n’est pas totalement cela, mais en tirant sur les ficelles on trouve quelques vérités ! 😉

Comme son nom l’indique,  « okla » et « humma », signifiant « peuple rouge », l’Oklahoma est l’état qui compte le plus d’Amérindiens (8%), et de personne parlant une de ces langues indiennes (25 langues au total !).
En effet, après que les français aient annexé ce territoire au 18ème siècle au profit de la Louisiane Française, puis vendu aux USA au début du 19ème siècle, l’Oklahoma a vu la moitié de ses terres de l’est utilisées pour les réfugiés Amérindiens, appelé alors Territoire Indien. C’est cette période appelé « Piste des Larmes », qui est la grande déportation des indiens de toutes les régions à l’est de l’Oklahoma : Cherokees, Seminoles,  Chickasaws… Des milliers et des milliers d’indiens arrachés à leurs terres par les colons, et envoyés dans des réserves loin de chez eux…
Malgré le fait que plus de 30 tribus se partagent déjà ces espaces, les colons sont tout de même invités à s’installer dans la région : vers 1890 ils viennent s’y installer massivement. Pour booster l’économie de la région et la valorisation des terres, c’est la période des « Land runs », courses à la terre, où le premier arrivé est le premier servi pour fonder son exploitation… Amérindiens et colons ont pu profiter de cette lois pour s’installer et grands espaces aidant, vont développer des ranchs et les métiers de l’élevage bovin : c’est l’ère des cow-boy !  Durant la dernière décennie du 19ème siècle, la découverte de pétrole en Oklahoma va encore plus encourager l’arrivée de nouveaux migrants… En 1907, l’Oklahoma devient le 46ème état des USA, et regroupe à lui le Territoire Indien.
Par la suite, les Noirs libérés de l’esclavage vont aussi s’installer dans la région pour fuir le racisme, et former des communautés et petites villes, dont certaines existent encore.
Jusque dans les années 1920-30, l’économie se porte bien, jusqu’au drame du « Dust Bowl », dont on juge l’importance dans Les raisins de la colère de Steinbeck : pendant 10 ans, des tempêtes de poussière ont anéantis l’agriculture en Oklahoma et ensevelis maisons, matériels, cours d’eau… Alors que la crise de 1929 a rendu exsangue l’économie du pays, ces catastrophes naturelles achèvent l’Oklahoma : c’est la période des grande migration de la population (près de 300000 !), les Okies, vers la Californie. Mis en cause : les vents violents et brûlants en été, bien connus dans la région (l’Oklahoma est en plein sur la Tornado Alley, et a une bonne partie de ses terres en zone aride), mais aussi le surlabourage, rendant les sols plus friables.
Les fermiers ont donc du apprendre l’écologie bien avant tout le monde : terres en jachère, plantations d’arbres pour freiner les vents et maintenir la terre… Dans les années 50-60, l’économie et l’immigration repartent grâce à ces changements, avec notamment la constructions de grandes zones d’eau artificielles pour alimenter les cultures : l’Oklahoma est aujourd’hui l’état qui a le plus de points d’eau artificiels aux USA.

Son passé agricole, l’Oklahoma l’a préservé : c’est un des leader dans l’élevage de bovin dans le pays, mais aussi un grand producteur de céréales, dont le blé.
Mais le pétrole et les industries de l’énergie sont les fers de lance de son économie : forages pétroliers, raffineries, mais aussi barrages hydroéléctriques, éoliennes, gaz naturels… Les secteurs de l’aérospatiale et produits manufacturés sont aussi générateur d’emploi… ainsi que la logistique.

En effet, l’Oklahoma présente l’intérêt d’être au milieu des USA ! Et vu la taille du pays, c’est une étape appréciable et quasi obligatoire pour qui veut le traverser d’est en ouest ! A la grande époque de la Route 66 qui relie Chicago à Los Angeles, celle-ci passait par Tulsa. Aujourd’hui encore de nombreuse autoroutes Interstate traversent l’Oklahoma, et l’état possède plus de 150 aéroports. L’une des voies navigable les plus active au monde se trouvent aussi dans cet état, reliant les ports de Tulsa et Muskogee au fleuve Mississippi.

Mais malgré tout ces avantages, l’Oklahoma n’est pas très attirant socialement
Situé dans la Bible Belt, la religion a une importance extrême, quand on le suppose dans le roman. Forcement conservateurs, les questions sur l’avortement, les mariages gays, la théorie de l’évolution,… ne se pose pour ainsi dire pas.
Bien entendu la peine de mort est pratiquée, mais dans leur grande bonté toute chrétienne, l’Oklahoma a été le premier état à adopter l’injection létale en 1976 comme mode opératoire pour passer leurs condamnés de vie à trépas, méthode moins cruelle que la chaise électrique ou la pendaison… Depuis l’Oklahoma est le super champion des USA quant à l‘application de la peine de mort, et surpasse même le Texas dans ce domaine !
Un hasard peut-être, c’est l’état qui dépense le moins pour ses étudiants… mais pas le plus mauvais dans le domaine de l’éducation tout de même.
Côté santé, ça n’est pas beaucoup mieux : peu de médecins, 25% de la population sans assurance maladie, un taux d’obésité record (30 %, mais ils ne sont que 5ème). Mais le tableau n’est pas si noir : les hôpitaux fonctionnent plutôt biens, et certain sont même très réputés aux USA.
Comme pas mal d’états du Sud, la vie est peu chère, mais le taux de pauvreté est plus haut que dans le reste du pays.
Malgré les grands espace, sur ses 3,7 millions d’habitant, plus de 58% vivent en ville, notamment à Oklahoma City, la capitale de l’état. Cette ville est funestement connue pour l’attentat de 1995 qui tua 169 personnes, et qui en fait le second acte terroriste le plus destructeur après le 11 septembre 2001.

Là où l’Oklahoma se distingue, c’est pour son attrait pour le sport, universitaire et pro, comme le roman l’indique. Basket-ball, base-ball, soccer, football américain, golf… Leurs supporter en sont fous !
Autre sport plus atypique : le rodéo, qui est populaire dans l’état, et dénote bien de la volonté de l’Oklahoma de continuer à sauvegarder des traditions, et pas uniquement pour le folklore et le tourisme. Les Amérindiens, du fait de leur concentration dans ces territoires, peuvent organiser des rassemblements colossaux pour des festivités comme des pow-wows, mais aussi continuer leurs activités artistiques, musicales, artisanales…

Voilà donc un état assez tentant, malgré ses petits (gros ?) « moins » sociaux… L’image même des Etats-Unis par son folklore, mais aussi ses paysages, la faune et la flore. L’Oklahoma a de nombreuses zones protégées et parcs, où on peut retrouver des bisons, chiens de prairies, ours noirs… que ce soit dans les steppes, prairies, montagnes, forêts…