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« Le problème Spinoza » d’Irvin Yalom

En feuilletant le catalogue Audible cet été j’ai été intriguée par cet auteur, Irving Yalom, dont le nom en « Y » allait forcément m’aider un bon nombre de fois pour le challenge ABC. Je n’ai donc pas hésité en lisant le résumé de ce livre audio et l’ai intégré à ma liste pour l’écouter immédiatement.

A l’orée du 20ème siècle, Alfred Rosenberg, encore lycéen, reçoit une punition pour ses propos antisémites : faire des recherches sur Spinoza… un des plus grands philosophes, celui que Nietzsche lui-même adulait, et qui s’avère être d’origine juive. A partir de là va se créer dans l’esprit d’Alfred une vraie problématique : comment un homme aussi brillant que Spinoza a bien pu être juif ? Il passera une vie entière à tenter de résoudre cette énigme, vie pendant laquelle il deviendra le principal théoricien du nazisme… Il finira même par voler l’ensemble de la bibliothèque de Spinoza à Amsterdam pendant la Seconde Guerre Mondiale afin de découvrir qui le juif Spinoza devait bien copier…
En parallèle, nous découvrons la vie de Spinoza au milieu du 17ème siècle… un homme trop intelligent et éclairé pour suivre les préceptes qu’on lui inculque à la Synagogue. Trop enclin à laisser aller sa liberté de pensée s’exprimer, il finit excommunié et doit quitter sa communauté. Exilé, il vivra en ascète, mettant au loin ses émotions pour rédiger son Ethique, qui ne paraîtra qu’après sa mort… Ce livre même qui inspirera des sentiments mitigés à Alfred Rosenberg.

Deux lignes de destins croisés, voilà un type de récit qui me plait, surtout quand il s’agit de biographie… Enfin d’histoires de vie romancée, car on apprend dans l’épilogue qu’on ne sait quasiment rien de Spinoza, à part ce qui concerne son excommunication. Son portrait est un faux, dans le sens où il a été dessiné sur base d’une description écrite du philosophe… et même sa bibliothèque musée à Amsterdam n’est pas d’origine. Non pas que les Nazis l’auraient volé : elle a toujours été fausse. Il s’agit d’un regroupement d’ouvrages anciens par un passionné de Spinoza, car à la mort de ce dernier tous ses livres auraient été vendus… Autant vous dire que moi-même, j’ai commencé à m’intéresser à ce philosophe, mais comme le jeune Rosenberg, je suis rebutée par l’aspect hermétique de son Ethique, illisible si on n’est pas guidé. Ça m’aura au moins permis de retrouver mes bouquin du Bac 😉
Évidement côté Rosenberg la biographie est moins fascinante, mais pas moins passionnante, dans sa recherche de la reconnaissance de son intelligence auprès du plus grand manipulateur de ce siècle, Adolf Hitler.

Bref, on ne s’ennuie pas une seconde, et j’ai très envie de lire un autre ouvrage de cet auteur. Rendez-vous l’année prochaine !

« Fouché » de Stefan Zweig

En ces temps de confinement je suis plutôt fainéante sur la lecture… Heureusement que les livres audios m’ont permis de ne pas prendre trop de retard dans mon challenge ABC ! Un casque sur les oreilles, dans le lit avant de dormir ou à bronzer entre midi et deux sur la terrasse… un petit plaisir à peine coupable 😉
Depuis 3 ans j’ai trouvé en Stefan Zweig l’auteur idéal pour la lettre Z des challenge ABC… j’aime surtout ses biographies historiques, qui me permettent d’appréhender la grande Histoire par la petite. En suivant les avis des lecteurs sur Audible, mon dévolu s’est jeté sur la biographie de Joseph Fouché, inconnu au bataillon pour moi alors !

Joseph Fouché est pour Stefan Zweig le premier animal de sa race : l’homme politique. Sans réellement avoir de convictions affirmées, Fouché a louvoyé pendant la période de la Terreur, du Directoire, du Consulat, de l’Empire, de la Restauration… De 1792 à 1816 il devient un personnage clé de l’Histoire de France, à priori vilipendé par les historiens car considéré comme l’homme qui a fait tomber Napoléon. Ce qui entre nous n’est pas rien ! Mais bien entendu les choses ne sont pas aussi simple.
Fouché est initialement un professeur ordonné au séminaire d’Arras et on le voit 10 ans plus tard en 1793 à Lyon fusiller des aristocrates et des curés, piller des églises et bruler des objets religieux. Lorsque le règne de la Terreur n’est plus à la mode, il retourne subtilement sa veste et suit la nouvelle mode du Directoire, dans la Police secrète…
En aidant au coup d’état de Napoléon, il dirige alors la Police et fait mine de regarder ailleurs, il va débuter le rôle pour lequel on le connait aujourd’hui dans les livres d’histoire : Ministre de la Police. Les relations des deux hommes sont houleuses, ils se craignent, mais le caractère tempétueux du général Corse se heurte au caractère inamovible de Fouché, froid, précis et travaillomane…
Il rate le coche de la Restauration car il n’arrive pas à Paris assez tôt lorsque Louis XVIII prendra le pouvoir. Pas de chance, mais cela lui permettra de faire croire à son attachement à l’Empereur et de devenir l’homme clé des Cents Jours, à la suite de l’évasion de Napoléon de l’ile d’Elbe… Rôle qui lui permettra de faire évincer Napoléon au profit du retour de Louis XVIII contre un poste dans cette monarchie.
Malheureusement pour lui, Louis XVIII a un sursaut d’orgueil et se souvient que Fouché était un cosignataire de la mise à mort de son frère Louis XVI sous le règne de la Terreur… et est banni de France sans autre forme de procès. Devenu infréquentable, il fini sa vie dans une ville de province autrichienne, et meurt d’ennui…

Un vrai roman feuilleton ! C’est à se demander pourquoi une série TV n’est pas encore sortie sur sa vie !

Je savais bien que FOuché m’était inconnu, mais en plus je me suis aperçue alors que je ne connaissais rien du tout à cette époque, où tout allait vite, où tout était mouvement : changements de régimes à un rythme effréné, guerres civiles ou internationales, alliances et oppositions… En très peu d’années la France et Fouché en ont vu, et des belles !
Sous la plume de Zweig on ne peut pas détester ce personnage assez nuancé, attiré uniquement par l’exercice du pouvoir.

Comme toujours avec les biographies de Zweig, une belle découverte qui me donne envie de m’intéresser un peu plus à l’histoire !

« Magellan » de Stefan Zweig

Si je participe à des challenges de lecture, comme le Challenge ABC, c’est pour découvrir des auteurs et des bijoux comme ce Magellan ! La lecture sous contrainte a cet avantage, nous diriger vers des terres inconnues… Maintenant que j’ai goûté au charme de Stefan Zweig, je n’ai plus qu’un objectif, en faire un lieu de villégiature !

Nous avons tous entendu parler à l’école, de Magellan. On y apprend qu’il a fait le tour du monde… bien bien bien… Mais sait-on réellement quels étaient les enjeux d’un tel périple au 16ème siècle ?
Sous la plume de Stefan Zweig se dresse le portrait de Magellan tout en subtilité : un expert de la navigation portuguais, taciturne mais persévérant, de sang noble mais qui a servi comme combattant en Inde… Nous découvrons comment a émergé l’idée d’un voyage vers l’Ouest pour rejoindre l’Inde, les difficultés pour mettre en place un tel projet, les dangers qui jalonnent une telle odyssée…
Une biographie magnifique où un tableau de l’Europe de la fin du Moyen-Age côtoie l’odeur des épices de l’Inde, un récit de voyage où les passions des hommes se brise sur la rudesse de nature… et de leur propre orgueil.
Si à la sortie de ma lecture de Sapiens je maudissais le moment où les Hommes ont pris le chemin de mers pour asservir un peu plus la planète, l’aventure de ce Magellan contée par Zweig, m’a reconcilié avec l’humanité et ses oeuvres, et pourtant, l’auteur est loin de nous présenter dans cette expédition un idéal d’humanisme et de moralité.
En écoutant ce livre j’ai pensé aux paroles de Hegel, « Rien de grand ne s’est fait sans passion », ce qui est on ne peut plus vrai ici !

J’ai écouté ce livre sous format audio, et j’ajouterai que la voix du narrateur est très bien adaptée au texte, ce qui permet de se sentir transporté véritablement dans cet univers.

Un gros coup de coeur… et c’est sans hésitation que je vais me diriger vers d’autres ouvrages historiques de Zweig dans les mois à venir. Et oui, il faut bien que je prépare ma liste pour le challenge ABC 2019 😉

 

 

« Les chats des écrivains » de Bérangère Bienfait, Brigitte Bulard-Cordeau et Valérie Parent

Les chats des écrivainsPause féline grâce au partenariat Folio du mois dernier, qui comme promis nous présente les relations  passionnées entre des écrivains et leurs chats.

D’abord il y a forcément les écrivains qu’on associe immédiatement aux chats, comme Colette. Et ceux dont on avait oublié qu’ils avaient écrit sur ces petites boules de poils, comme Edgar Poe, ou George Brassens. Il y a les écrivains qui ne peuvent vivre qu’au milieu de centaines de félans, comme Hemingway. Il y a aussi des chats célèbres, comme celui qui gardait le bibliothèque de Spencer en Iowa et qui a eu le droit à sa mort aux hommages de journaux du monde entier. Ou encore les lignées de chats comme les Jock, qui ont survécus à Churchill et sont encore maîtres de sa maison de Chartwell. Bref, des chats de toutes les tailles, de toutes les couleurs, et forcément adorés par leurs humains !

On apprend quelques anecdotes sympathiques sur les chats et leurs maîtres, qui sont souvent drôles ou touchantes. Quand on est fan comme moi de félins, on a un petit sourire aux lèvres en imaginant les bestioles et leur propriétaires. Après, les anecdotes sont courtes, et on a parfois envie d’en savoir plus… Mais charge à nous d’approfondir !

Une lecture rafraîchissante et courte, parfaite pour le métro et les matins d’hiver maussades. Avec l’image d’un chat, on est jamais vraiment déprimé d’aller au travail dans ces conditions 😉

« Le Juste Milieu » d’Annabel Lyon

Le juste milieuMon premier partenariat avec Folio m’a permis de faire une vraie découverte : je pense que je ne serais jamais allée spontanément vers Le Juste Milieu, de l’auteure canadienne Annabel Lyon paru en 2009, sans la proposition de l’éditeur.
Et pourtant, j’aime assez ce qui traite de la Grèce Antique, des grands philosophes, de la mythologie… J’ai donc été enchantée par cette lecture, qui retrace une période de la vie d’Aristote en Macédoine auprès de son illustre élève, Alexandre le Grand.

En route pour Athènes, Aristote et les siens passent par la capitale de Macédoine, Pella, afin de rencontrer son vieil ami, le roi Philippe. Une visite qui devait durer quelques jours va finalement durer plusieurs années : le roi désire qu’Aristote, élève de Platon, devienne le professeur de son fils Alexandre. Si son père lui apprend à devenir un roi, si les généraux le forment à devenir un guerrier… Aristote va se faire un devoir d’éduquer l’adolescent, de développer son intelligence et d’en faire un homme qui tend vers le bien.

Aristote raconte Alexandre le Grand, éblouissant et charismatique, depuis ses jeunes années jusqu’à ses grands succès militaires. On plonge dans l’intimité du Prince qui deviendra un des grands rois de l’Antiquité, tant ses conquêtes sont impressionnantes : il a vaincu non seulement grâce à ses compétences militaires, mais aussi et surtout par l’absorption des cultures Perses, Grecques… pour les fusionner à sa façon. Une leçon d’Aristote à en croire ce récit 😉
On en apprend beaucoup sur l’histoire de la Macédoine et de la Grèce, les secrets de la cours, les stratégies politiques et militaires… Mais aussi sur la vie d’Aristote, philosophe mais aussi médecin, artistes, professeur… prisonnier de la cage dorée qu’est le palais du roi de Macédoine, dans cette région rude qui est loin d’avoir les attraits d’Athènes.

Ce qui m’a surprise par moment, c’est le petit côté « la vie avant la psychanalyse » du roman. Je l’ai appris après, mais Aristote c’est posé beaucoup de question sur l’âme, les passions, l’intellect… dans ses écrits. Bref, ce qu’on pourrait appeler plus tard la psychologie.
Quoiqu’il en soit, on a souvent l’impression d’avoir un Aristote dépressif, quand ce n’est pas un Alexandre bipolaire,… Tous les personnages sont tourmentés par leurs passions : une vraie tragédie grecque !
Bref, Aristote souffre de maux qu’il ne peut nommer, les connaissances en médecine de l’époque se résumant à des jeux de fluides, d’équilibres d’humeurs… quand on ne met pas tout simplement cela sur le compte de la volonté des dieux.

L’écriture donne vraiment l’impression de voir les faits via le regard d’Aristote, de suivre le fil de ses pensées, dans un style sensible, intelligent, et passionnant !
D’un point de vue philosophique, on prend une belle leçon de mesure et d’ouverture (dans la limite du raisonnable de l’époque). J’aurais au moins appris des choses concernant l’équilibre entre les extrêmes, que ce soit au niveau des comportements, des personnes ou des choses !

Merci à Folio pour ce partenariat très enrichissant ! Je conseiller franchement ce livre : je pense que chacun peut y trouver des choses à apprendre, que ce soit en histoire, en philosophie .. ou alors prendre tout simplement plaisir à lire cette belle écriture !

« Avenue des Géants » de Marc Dugain

avenue-des-geantsJe n’ai aucune idée de la manière dont j’ai bien pu entendre parler de ce livre… Tout ce que je sais, c’est que je me suis motivée à le lire pour le challenge ABC, et aussi et surtout que j’ai adoré cette lecture !
Moi qui suis passionnée d’histoire de serial-killer, et qui aime histoire qui se passent dans le Grand Ouest Américain, je suis bien servie avec Avenue des Géants ! Et pourtant, l’auteur à qui ont doit ce roman est Français ! Marc Dugain, que je découvre pour la première fois, est spécialisé dans les histoires reprenant des éléments de biographies de personnages célèbres, comme Staline ou Hoover… Dans ce roman paru en avril 2012, il s’inspire de la vie du tueur en série Edmund Kemper.

Entre une mère qui le maltraite et un père qui veut se débarrasser de lui pour refaire sa vie, Al Kenner, 15 ans, se retrouve à vivre chez ses grands-parents en Californie. Du haut de ses 2,20 mètres et de son QI supérieur à celui d’Einstein, il supporte mal l’oppression de sa famille… Malgré son aversion pour la violence, il va un jour prendre un fusil et abattre sa grand-mère qui l’étouffe, puis son grand-père pour lui éviter la peine d’un deuil. Ça n’est pas qu’il soit particulièrement empathique, mais Al à le sens pratique…
Enfermé en hôpital psychiatrique pour soigner sa supposée schizophrénie, il va collaborer avec les médecins, profiter de ce temps pour comprendre ses pulsions et rêves de décapitations, et étudier la psychologie. Au bout de 5 ans il ressort libre, en plein dans l’époque du Flower Power et de la guerre du Vietnam
Va-t’il oser revoir ses parents ? Pour lui une nouvelle vie est-elle possible ? Lui et la société peuvent-ils oublier et pardonner le fait qu’il a brisé le tabou du meurtre, à une époque où la mort est rationalisée par les guerres ?

Je me suis trouvée aspirée par ce roman qui est vraiment bien écrit, passionnant, et qui passe comme du velours malgré l’horreur de la vie d’Al Kenner.
La comparaison avec le serial-killer de La cache du Diable que j’ai fini il y a quelques jours est frappante, même si Vassago et Al ont la même pathologie : schizophrénie, sociopathie, manque d’empathie… Le portrait de Al en tant que tueur en série est crédible, réaliste… Vassago à côté en prend un coup avec son traitement symbolique. Al fait vraiment « humain« , avec un je ne sais quoi qui le met en décalage : son manque d’empathie empêche réellement tout attachement ou projection pour moi, sans pour autant l’avoir en aversion comme qu’est Vassago.
L’idée de l’héritage du mal est une des idées qui forme la trame de fond du roman, et construit le personnage d’Al. Ce qui fait qu’il est ce qu’il est vient de multiples facteurs : sa famille jusqu’à des générations avant lui, la nature humaine pervertie à la base,… La psychologie est un peu l’excuse qui le conforte à tuer, comme d’autres choisissent d’écouter la voix d’un démon dans leur tête…

La manière dont l’histoire s’articule ménage le suspense jusqu’au bout : on suit à la fois l’histoire « chronologique » des 15 ans d’Al jusqu’à ses 20 et quelques années… et en parallèle ses rencontres en prison au parloir avec Susan, alors qu’il a 50 ans. Celle-ci lui apporte des romans à lire et dicter pour les aveugles, pour des maisons d’édition.
Même si on se doute bien qu’il a fait quelque chose de terrible pour finir en prison et surtout y rester si longtemps, on espère pendant tout son récit qu’il ne passera pas à l’acte qui le démange… même si tous les indices qui jalonne son histoire nous font penser le contraire.

coup de coeurUne super découverte et un coup de cœur ! Je le conseille vivement, pour la bonne surprise que j’ai eu en le lisant… Un roman récent et français, rien ne me laisser envisager que j’allais autant aimer cette lecture 🙂

 

challenge ABC

« Les mille et une vies de Billy Milligan » de Daniel Keyes (Etat de l’Ohio)

Excellente surprise pour mon billet sur l’Ohio, pour le challenge « 50 états, 50 billets » ! En cherchant un roman se passant dans cet état, je ne pensais pas tomber sur un des ouvrage du très apprécié Daniel Keyes… Son roman Des fleurs pour Algernon doit être un de mes livre préféré, ou du moins un de ceux que je conseille très souvent autour de moi.
Je me suis donc lancée dans la lecture de son roman de 1982, Les mille et une nuit de Billy Milligan, avec un à priori positif, et je dois dire que je n’ai pas été déçue. Le pitch du livre me plaisait assez : la vie d’un homme habité par de multiples personnalités… et en plus c’est un histoire vraie ! Tout pour me fasciner et me plaire 🙂

On va donc découvrir ce qu’est et a été la vie de Billy Milligan, arrêté en 1977 pour 3 viols et vols sur des étudiantes de l’Ohio. Le voyant nier farouchement les faits, ses avocats ont un doute et le font examiner par des psychologues : Billy est  déclaré souffrant d’une maladie mentale atypique : il est habité par plusieurs personnalités, bien distinctes les unes des autres. En gros il a une enveloppe humaine, et une vingtaine de personnes qui animent son esprit successivement. Ce qui fait que quand une personnalité prend le dessus sur l’autre, cette dernière à l’impression de « perdre son temps », et souffre d’amnésie. Donc il ne se souvient pas avoir violé des jeunes femmes, alors que toutes les preuves l’accusent !
Bien entendu on va s’intéresser à l’aspect juridique, et à l’enquête de police, qui a permis de découvrir (assez rapidement) l’auteur de ces viols. Mais le cœur de l’ouvrage est dans l’analyse de la psyché de Billy, qui va permettre aux spécialistes de découvrir son « problème » et de lui faire accepter…

La construction en 3 chapitres permet de s’intéresser à l’histoire de Billy sous différents angles :
– dans le premier chapitre, on assiste à son arrestation et la découverte de sa pathologie et des 10 personnalités « connues » par lui… puis des 14 autres cachées ou indésirables. On rencontre par exemple parmi ces personne habitant son corps : Arthur le britannique intellectuel, Allen le roublard, Ragen l’homme fort d’origine yougoslave, Danny le gamin terrorisé… Certains de  ces personnages ne connaissent pas les autres, d’autres peuvent communiquer entre eux. Mais globalement, Arthur est le leader de cette « famille ». Le vrai Billy est endormi depuis son enfance pour lui éviter de souffrir, et on découvrira pourquoi… Traité dans un hôpital à Athens dans l’Ohio après son arrestation, il tentera de fusionner ces personnalités pour ne faire plus qu’un, afin de vivre une vie normale. C’est aussi à l’hôpital qu’il rencontrera l’auteur qui deviendra son biographe.
– le second chapitre retrace la vie de Billy, à la mémoire retrouvée grâce à une fusion de ses différentes personnalités.  On le suit donc de sa naissance à son arrestation et son traitement à l’hôpital. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il n’a pas eu une vie facile…
– le dernier chapitre évoque une période plus sombre : son traitement pas toujours évident, puis son incarcération à Lima, prison-hôpital où les infirmiers et médecins prennent les traits de véritables bourreaux. Ici, il va régresser dans sa guérison, est se scinder en plusieurs personnalités à nouveau. Son incarcération et son traitement deviennent un enjeu politique et médiatique : Billy attire la haine des uns, la compréhension des autres… Dans cette partie, l’auteur est clairement devenu son soutien et commence à s’insurger contre le système juridique, carcéral et médical de l’état de l’Ohio. Une ouverture parfaite vers le second livre de Keyes traitant de ce cas : Les 1001 guerres de Billy Milligan, paru en 2009 (mais écrit en 1993) et traitant de son combat contre le système (roman qui n’est pas sorti aux USA d’ailleurs…)

Pour moi c’est un roman captivant : le syndrome des personnalité multiples fait forcément de Billy un personnage complexe, chose que l’auteur rend très simple par son écriture et la manière dont il a construit le roman… Finalement on est assez peu dans le pathos pur et dur, Keyes utilisant des faits parus dans les journaux, interview de Billy, de médecins, infirmiers, famille… Des personnes qui croient en sa maladie et d’autres qui pensent qu’il simule pour échapper à la prison.
Mais on a forcément un parti pris pour Milligan, qui finalement fait office de martyr de l’administration et du système judiciaire assez binaire… On tombe donc dans une profonde empathie pour les personnages, peut être au détriment des victimes ?

Quoi qu’il en soit, j’ai vraiment beaucoup aimé ce livre, que j’ai dévoré dans le train et pendant mes vacances. Après je dois avouer qu’on est dans autre chose que Des fleurs pour Algernon, donc ça n’est pas évident que ceux qui ont craqué pour son premier roman apprécieront autant celui-ci !

Petit focus sur l’Ohio, où se déroule l’histoire du roman présenté ci-dessus…

Longtemps avant l’arrivée des Blancs, les Indiens bâtisseurs vivaient dans ces régions. Il ont construits des monuments, dont des sanctuaires et tumulus, qui sont encore visibles, quoique rare. Ces Améridiens disparaîtront, laissant place à d’autres tribus, dont les Iroquois qui donneront son nom à la région Ohi-yo’, signifiant « grande rivière ».
Se sont les Français qui colonisent les premier la région, au  18ème siècle, avant de céder la place aux Anglais. Ceux-ci la rattache à la Virginie. Après la guerre d’Indépendance et le Traité de Paris, l’Ohio rejoint les Etats-Unis en 1783. Mais il faudra attendre l’année suivante pour que la Virginie cède ces terres aux USA, pour que l’Ohio devienne vraiment un état à part entière, et 1803 pour que Colombus soit choisie pour être sa capitale.

L’Ohio de part sa situation géographique, au niveau des Grands Lacs, proche de l’Atlantique et des grandes villes de l’Est est un état assez riche : 6ème au niveau économique, grâce à l’agriculture, au pétrole…
Comme beaucoup d’états du nord des USA, les origines ethniques sont principalement européenne : allemand, irlandais, anglais, polonais, italiens…  une population très majoritairement Blanche.
Côté éducation, il est a noter que l’Ohio se trouve dans le top 5 en terme de quantité d’étudiant à l’université. La plus grande université du pays se trouve d’ailleurs dans cet état : l’Ohio State University. Ceci expliquant cela : l’Ohio est 1er en terme de qualité des bibliothèques !

Culturellement, ça n’est pas un état qui me semble avoir un caractère fort ou atypique, c’est un peu un état passe-partout : climat moyen, paysages moyens…  C’est peut être pour cela que la série à succès Glee prend place là-bas ?
Mais je suis assez injuste ! Car c’est dans l’Ohio que se trouve « le meilleurs parc d’attraction du monde », Cedar Point ! Une soixantaine d’attraction, dont les plus hautes et rapides montagnes russes au monde… Et surtout, le parc a vu le jour en 1870 ! J’étais loin de me douter que les parcs d’attractions étaient si anciens ! Et encore, ça n’est pas le parc le plus vieux, mais le second, après Lake Compounce dans le Connecticut. Outre les manèges à sensation qui voient le jour à partir des années 50, et les roller-coaster qui à chaque fois battent des records ou font sensation en terme d’innovations technologiques ; le parc est composé de marinas (on est au bord du lac Erié), hôtels, restaurants… De quoi attirer plus de 3 millions de visiteurs par an !

Bref, un état qui à l’air agréable à vivre finalement, même si au niveau touristique je n’y voit que peut d’intérêt… Je crois que si je devais m’installer aux USA, je miserais sur cet état vu la qualité de son éducation et son potentiel économique !

« L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford » de Ron Hansen (Etat du Missouri)

Un peu d’ambiance western pour changer, avec ce roman nous narrant les exploits de Jesse James, comment il vécu, comment il est mort… et si j’osais, je vous demanderez si ça vous a plu et si vous en voulez encore ? ;).
En tous cas, un livre parfait pour ma collection du challenge « 50 états, 50 billet » : grâce à lui, je rempli la ligne Missouri !

Même si elle est romancée, c’est bien à une biographie à laquelle nous avons affaire ici : la vie de Jesse James, avec un gros point de focus sur ses dernières années, durant lesquelles il rencontre les frères Ford, et plus particulièrement le cadet Robert Ford

Jesse James de son vivant, mais aussi bien des années plus tard, a été considéré comme un des héros controversé de l’Amérique de la fin du 19ème siècle : ancien soldat Confédéré, il devient un hors-la-loi, forme une bande avec son frère Frank et d’autres brigands, et n’hésite pas à voler des banques, attaquer des trains… et de tuer quiconque se mettrait au travers de leur chemin.
Beaucoup d’histoires à son propos ont parus dans les magazines de l’époque, faisant de Jesse James une légende vivante, un héros de plus en plus édulcoré par les écrivains et les médias. Comme beaucoup de grands voleurs, il était considéré comme une sorte de Robin des Bois, volant aux riches et donnant quelquefois aux pauvres : il aurait donné des parts de butins à des bonnes œuvres, ou a une veuve prête a se faire saisir sa ferme…
Autre point fort de Jesse James, son goût pour la communication : il écrivait lui même aux journaux pour revendiquer des attaques, donner sa version des faits, s’auto-congratuler… bien entendu la population était avide de ces sensations, et une partie de celle-ci acclamait les frères James !

Dans cette version de l’histoire écrite par Ron Hansen, le tableau brossé de Jesse James n’est pas aussi complaisant, mais pas complètement noir non plus… Avec en arrière plan le folklore du mythe vivant Jesse James, on se confronte à la réalité des faits : meurtrestraîtrise, ultra-violence, peur… Il en est d’ailleurs de même pour tous les protagonistes !
Bob Ford aussi est présenté comme un jeune homme avec quelques qualités et de nombreux défauts, loin d’être un sauveur, mais plutôt une petite crapule voulant jouer les héros…
Le portrait du personnage de Jesse James est assez effrayant, a à peine 34 ans, il est dépeint comme une sorte de maniaco dépressif complètement paranoïaque, persuadé d’être en contact avec les esprits (il « voit » le futur, à énormément d’intuition, pense voir des signes de Dieu régulièrement…), obsédé par la médecine de son époque (lotions, poudres et sirops en tous genres, très au courant des « remèdes de bonnes femmes »), ne se déplaçant jamais sans ses revolvers, prêt à tuer de sang froid si cela s’avère utile… Mais à côté c’est un père aimant, qui joue avec ses enfants, s’occupe des ses bêtes à la ferme, et un époux fidèle qui cherche toujours un moyen d’aider sa famille.
C’est à grand renfort de détails que le tableau se brosse : comment Jesse James, toujours sur ses gardes, qui a échappé des dizaines d’années aux autorités va-t-il finalement se faire prendre ? Et pourquoi Robert Ford, si obsédé par ce hors-la-loi, va-t-il finir par le tuer ?

Finalement pas de grandes épopées type western classique avec des coups de feu dans tous les sens et des courses poursuites, des enquêtes dans les bas fonds des villes ou des chevauchées à l’assaut des indiens : on est plutôt dans un drame psychologique un peu glauque, parsemé de riches références historiques.

Même si la lecture de ce livre ne m’a pas transcendé, il y a tout de même des passages qui m’ont plus : on en apprend sur l’histoire des Etats-Unis de la fin du 19ème siècle, après la guerre de Sécession, et juste avant l’essor de l’Amérique industrielle du 20ème siècle… Bref, on est entre deux mondes, plus vraiment chez les pionniers, et pas encore dans un monde de gentlemen.

Le Missouri est la terre d’élection de Jesse James, même si l’a bourlingué dans pas mal d’états : Kentucky, Californie, Nouveau-Mexique, Kansas, Tennessee… Il reviendra sans cesse dans le Missouri, où vivait ses parents, ceux de son épouse, et le reste de sa famille.

L’état du Missouri, fait parti du Middle West. Sa capitale est Jefferson City, mais déjà à la fin du 19ème siècle Kansas City est un des principaux centres d’attraction… On voit d’ailleurs beaucoup cette ville dans le roman. A noter que Kansas City est aujourd’hui à moitié dans le Missouri et moitié dans le Kansas. Une autre ville très importante, Saint Louis, qui est une ville indépendante, se trouve aux confluents des fleuves Missouri et Mississippi.

Historiquement, après avoir appartenu aux Sioux et Algonquins, le Missouri a été colonisé par la France à la fin du 17ème siècle et a fait parti du territoire de la Louisiane. Après être passée entre les mains des Espagnol et des Français sous le nom de Louisiane Occidentale, le territoire est finalement vendue aux Etats-Unis en 1803.
Le Missouri choisi de devenir un état esclavagiste au début du 19ème siècle, mais fera tout de même parti des états de l’Union (du Nord, à priori pour l’abolition de l’esclavage) lors de la guerre de Sécession. Ce clivage est à l’ origine de guérillas entre la population favorables à l’Union et ceux qui se réclame de la Confédération lors de cette guerre… Et dans le roman, Jesse James est plutôt du côté des Sudistes !

Fidèle à l’image qu’on peut s’en faire, le Missouri est un état agricole, un des premiers producteurs de viandes des USA. A cela se rajoute la production industrielles, l’exploitation de mines…

Kansas City et sa région se trouve en plein sur la « Tornado Alley » et se trouve  souvent ravagée par les tornades… On voit régulièrement des dizaines de personnes décéder suite à ces catastrophes naturelles dans les journaux, et la dernière tornade meurtrière date d’à peine mai dernier !… Voilà finir de donner l’impression d’un état encore sauvage !

« Biographie de la faim » d’Amélie Nothomb

Une lecture rapide et gourmande pour passer le temps de transports lors de mon périple en Picardie pour le Nouvel An… avec un titre assez à propos avec l’orgie de cette fin d’année : Biographie de la faim, d’Amélie Nothomb, sorti en 2004. Je l’ai choisi un peu au hasard dans ma longue PAL de cette auteur… et je trouve que je devrais plus souvent laisser faire le hasard 😉

Très bonne lecture donc !
Cette fois, et contrairement à un roman comme Mercure , Amélie Nothomb nous propose un récit plus autobiographique (après je n’ai pas été voir si c’est une biographie avérée… je le considère plutôt comme un roman avec Amélie comme personnage central). Au niveau de la chronologie de la vie de l’auteur, ce livre s’intercalerait entre Métaphysique des tubes et Stupeur et tremblements. Il s’agit donc de la période entre ses 3 ans et ses 21 ans, où elle vivra dans différents pays.
Son père consul puis ambassadeur belge, doit changer d’affectation et de pays régulièrement. Toute la famille le suit donc : sa mère, Amélie la plus jeune de la fratrie, Juliette sa soeur de 2 ans son aînée, et son grand frère André. Suite au déchirement de quitter sa terre natale du Japon, Amélie va découvrir la vie sous la dictature chinoise, les fastes de New-York, la famine et la violence du Bangladesh, l’incompréhensible Belgique… pour retourner au Japon après ses études. La boucle est bouclée.

Sous cette trame biographique, une vraie question qui m’a emballée dès les première page : comment la faim construit en tant qu’individu. Pas seulement la faim alimentaire, mais aussi la faim de connaître, la faim de plaisir, la faim du contact des autres… et comment cette faim crée un appétit de la vie, une énergie bien spécifique, qui est une recherche du bon et du beau ! (ce qui est bien loin des concepts judéo-chrétien, où le bon est considéré comme mauvais… heureusement qu’Amélie à vécu sa jeunesse dans un pays shinto / bouddhiste).
On avait vu Amélie chocophile dans la Métaphysique des tubes, on lui découvre d’autres passion gustatives dans ce roman, qui s’inscrivent dans un schéma mystique et sensuel : les bonbons et gâteaux chapardés et dégustés en cachette devant un miroir, sa potomanie qui lui fait boire des litres et des litres d’eau, son alcoolisme infantile qui lui vient en finissant les verres de champagne lors de réceptions,… Avec l’adolescence, viendra l’anorexie et le désir de fragmentation de soi…
Outre ces anecdotes amusantes ou plus angoissantes, on découvre d’une certaine manière les traits qui donneront corps à ses fictions : la notion de couple au féminin comme celui qu’elle forme avec Juliette, l’enfermement vécu dans des bunkers lui ayant servi de foyer dans certains pays, la fragmentation de l’esprit, le rejet d’un corps considéré difforme, …
C’est ce qui plait à certains, et horripilent d’autres avec les romans d’Amélie Nothomb. Avec cette partition de sentiments, allant du bonheur à la dépression intense, elle arrive à composer de nouvelles histoire reprenant les mêmes lignes d’accords… Quand on le sait et qu’on l’accepte, je trouve ça assez agréable 😉

Côté style d’écriture, j’ai été surprise de prendre un peu de recul… en fait elle ne s’appesantit pas sur les faits négatifs pour les analyser dans tous les sens et voir de quelle manière ça a pu la changer (je pense en particulier à une sorte de viol qu’elle a subit). Ils sont livrés bruts, ce qui est assez troublant…
En revanche, elle peut détailler de quelle manière elle a pris goût à l’eau à 3 ans au Japon, en buvant à la louche en bois d’un temple, l’impression qu’elle à eu, le plaisir que cela lui a procuré.

Biographie de la faim est pour moi un livre passionnant sur la notion de plaisir, et sur la vie peut être, tout simplement.
Je dirait aussi que ça serait bien un de mes roman préférés d’Amélie Nothomb, car il porte en lui tout ce que j’aime dans ses autres récits autobiographique ou de fiction. Bref, je le conseille vivement à tous les amateur de cet auteur 🙂