« L’invention de Morel » d’Adolfo Bioy Casares

L'invention de MorelGrâce au challenge ABC – Littératures de l’imaginaire, je continue ma découverte des classiques de la SF.
Avec ce roman de l’argentin Adolfo Bioy Casares, écrit en 1940, on touche finalement à un monstre sacré : c’est ce récit qui a inspiré à Alain Resnais le film culte des étudiants en art ou en cinéma, L’année dernière à Marienbad (que je n’ai personnellement pas compris quand je l’ai vu il y a dix ans !).

Afin d’échapper à une condamnation de prison à perpétuité, le narrateur de cette histoire s’enfuit sur une barque pour une île du Pacifique, où personne n’ose accoster, et encore moins vivre. En effet, les marins du coin pensent qu’une peste qui fait tomber la peau, les ongles, les cheveux, et qui fini par tuer, est transmise par l’air de l’île. Le lieu idéal pour une retraite, pour un homme qui n’a plus rien à perdre !
Mais alors qu’il pense être seul, le narrateur découvre que des personnes vivent sur les hauteurs de l’île, des touristes, dans un bâtiment qu’il pensait abandonné !
Entre peur et méfiance, il va finir par se rapprocher d’une femme, qui aime se promener seule le soir et admirer la mer… Faustine. Et bien entendu, il va tomber amoureux d’elle ! Malgré ses tentatives d’approche, elle ne semble pas le voir. Essaye-t-elle de le faire enrager ? Ou alors aime-t-elle Morel, le beau parleur français ? Ou alors, n’est-elle vraiment pas de ce monde ? Le narrateur est-il mort, ou bien est-ce ce groupe de touriste qui hante l’île ? Et si la réponse n’était pas dans la psychologie des personnages, ni dans le monde du paranormal, mais bien dans la science ?

Mine de rien, ce livre est un vrai monument ! On est pas sans penser à L’île du Docteur Moreau quand on démarre cette lecture. Un narrateur paria en fuite qui témoigne de son expérience sur une île bizarre… Surtout avec un scientifique qui s’appelle Morel (le singulier de Moreau ? ;)).
Ensuite, quand on commence à se poser des questions sur la nature des « touristes » (fantômes, personnes vivants dans une autre dimension, groupe d’acteurs venus piéger le fuyard… ?), on ne peut que penser à la série Lost !
Mais quand on s’aperçoit que les « touristes » sont des hologrammes enregistrés par Morel sur une machine de son invention, on pense au théoricien de l’art Walter Benjamin, et sa question de l’art à l’heure de la reproductibilité technique… Si l’art rend l’artiste et son sujet immortel, Morel a fait encore mieux en donnant forme, corps et peut être même une âme à ses hologrammes ! Et tout cela pour un seul spectateur, un homme condamné par la justice et la société… Étrange communauté que celle de l’île de Morel !

J’ai adoré le style, on se demande toujours si le narrateur sombre dans la folie ou l’hyper-lucidité… Et avec lui on se pose des questions très juste sur l’homme, la société, l’art, … Avec au final une vraie pépite de la science-fiction !

Je vous conseille donc vivement cette lecture, que vous soyez ou non branché par les romans de science-fiction !

challenge de l'imaginaire ABC 2014

Poster un commentaire

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>