« L’Arbre aux haricots » de Barbara Kingsolver (Etat du Kentucky)
Opération challenge « 50 états, 50 billets » une fois de plus… Je tiens le bon bout, et je pense être dans les temps pour lire ou voir tout ce qu’il faut pour terminer ce challenge avant la fin de l’année ! Pour traiter le cas du Kentucky, j’ai décidé de lire ce roman qui m’étais inconnu mais dont j’ai entendu beaucoup de bien sur les forums et blogs : L’arbre aux haricots, premier roman de Barbara Kingsolver paru en 1988 aux Etats-Unis et en 1996 chez nous. Un beau voyage en perspective entre le Kentucky, l’Oklahoma et l’Arizona ! 🙂
A la fin du lycée, dans les années 1980, Taylor n’a qu’une envie : quitter son Kentucky natal, où son horizon est bouché par la pauvreté dans tous les sens du terme : pas d’avenir, pas de challenge, pas d’attrait… Elle prend sa voiture, dit au revoir à sa mère et prend la route vers l’Ouest avec ses économies en poche ! En Oklahoma, dans un bar où elle s’arrête boire un café, elle se retrouve face à une situation peu banale qui va bouleverser sa vie : une femme Cherokee lui donne un bébé, celui de sa soeur disparue, et s’enfuie ! Sans avoir le temps de dire quoique ce soit, Taylor se retrouve avec cette petite fille… Et ne peut se résoudre à abandonner cet enfant maltraité, et va l’emmener avec elle jusqu’à Tucson en Arizona où sa voiture rend l’âme… Comment vont s’en sortir Taylor et la petite fille qu’elle a nommé Turtle ?
Nous voilà face à une situation d‘abandon peu banal, et voyage initiatique qui ne l’est pas moins ! Taylor va rencontrer une quantité de personnages très intéressants, et tous très « humains » : Matty la réparatrice de pneus qui aide les sans-papiers d’Amérique du Sud à passer la frontière, Estevan le professeur d’anglais guatémaltèque, … et Lou Ann, chez qui elle s’installe en colocation, qui deviendra son amie et sa famille en Arizona, avec son fils. Des personnages pleins de blessures, mais qui savent s’entraider dans cette ville au milieu du désert !
Mais attention, on n’est pas dans un monde idéal : tout le discours du livre est basé sur le fait que le monde est injuste, aride comme un désert, mais qu’il suffit d’un peu d’espoir et d’amour pour faire ressortir le meilleur des gens, comme il faut juste un peu de pluie pour que le désert fleurisse et se remplisse de vie…
La relation entre Taylor et la petite Turtle est assez atypique : Taylor a quitté le Kentucky où, elle le répète, les ados tombent enceinte comme un rien, et se retrouvent enchaînées à leurs obligations et à cette région qu’elle déteste tant… Et pourtant elle aussi se retrouve mère sans vraiment le souhaiter, mais se sera en position de choisir si elle veut garder Turtle ou non. Bref, on est dans un roman sur le destin et le choix, les choix qu’on fait pour soi…
Un beau roman qui à une suite, Les cochons au paradis, que je lirai je pense à l’occasion : on est face à une histoire bien écrite et agréable à lire, une fable assez philosophique, où le monde n’est pas tout blanc ou tout noir… En plus les descriptions de la nature, des plantes, des paysages sont sublimes et me replonge dans les images de mon voyage en Arizona… et me redonne envie d’y aller 🙂
Ce roman débute au Kentucky, où Taylor et sa colocataire de Tucson Lou Ann ont vécu toute leur enfance… Il en sera fait référence très souvent ensuite, parfois pour le mettre en opposition avec l’Arizona.
Dès les premières pages, le climat social est posé : une région d’agriculteurs et d’employés, où les filles tombent enceinte avant la fin du collège, où finir ses études secondaires tiens du miracle et où les drames familiaux sont légion… Bref, ça n’est vraiment pas l’endroit rêvé pour vivre !
Ce contexte s’explique assez bien par la position du Kentucky sur la carte des Etats-Unis : entre le Sud assez pauvre et conservateur et le Mid-West très agricole. Mais sa physionomie est plus complexe.
De part sa position entre les Appalaches, le Mississippi et les Grandes Plaines, et de son climat subtropical humide, le Kentucky bénéficie d’une pluralité de ressources : agriculture certes, mais aussi et surtout une spécialité d’élevage de chevaux. Les montagnes de l’est lui fournissent des mines de charbon, et les fleuves des moyens de communication et de transport qui ont poussé la croissance de villes et d’industries, telle celle de l’automobile.
Si le Kentucky est connu chez nous, il ne faut pas se le cacher, c’est aussi grâce à la franchise KFC – Kentucky Fried Chicken ! Harland Sanders, son créateur, est né dans l’Indiana, mais ouvrira son premier restaurant / station service dans le Kentucky où il servira ses propres recettes. Après cela, il ouvrira le tout premier restaurant sous le label KFC en 1952 à Salt Lake City dans l’Utah. Depuis 1991, la chaîne connait en France une réussite fulgurante grâce à ses menus à base de poulet.
Au niveau culturel, le Kentucky est connu pour son style de country, le bluegrass, immortalisé dans le film O’Brother des frère Cohen.
C’est aussi ici que le bourbon aurait été créé, par des colons irlandais ou écossais qui cherchaient à créer un whisky… Ce nom « bourbon » est en fait le nom du comté Bourbon au Kentucky, baptisé ainsi en hommage à la France (les rois de la lignée des Bourbon) qui a joué un grand rôle dans l’indépendance des USA. La différence entre le bourbon et le whisky se situe principalement dans le vieillissement de l’alcool : dans des fûts de bois toujours neufs pour le bourbon, et anciens pour le whisky… Cela permet au bourbon d’obtenir un goût de bois plus rapidement, ce qui suppose un vieillissement moins long.
Intéressons nous maintenant à l’histoire de cet état, réserve de chasse historique des indiens Cherokee, Shawnee et Iroquois. Après l’arrivée des premiers européens sur le territoire américain, les britanniques prennent possession de cette région qu’ils rattachent à la Virginie… Dans les faits, ce qui deviendra le Kentucky ne sera pas exploré de si tôt ! A partir de 1750, la colonisation va commencer progressivement… surtout pour ouvrir des route vers les territoires de l’Ouest. Les Cherokee et Shawnee acceptent assez mal cette intrusion sur leurs territoire, et déclareront la guerre aux envahisseurs. Par jeux politiques, ces amérindiens se lieront aux anglais lorsque la guerre d’Indépendance éclatera, afin de faire bloc contre les américains. La population du Kentucky souffrira de cette guerre, au point de demander la scission avec la Virginie à laquelle elle est encore rattaché : le Kentucky et la Virginie sont séparés par les Appalaches, difficilement franchissable, ce qui a isolé la région pendant la guerre. En 1792, le Kentucky devient un état à part entière, le premier de l’Ouest (ouest des Appalaches), et choisis la ville de Frankfort comme capitale. A noter que c’est aussi un des trois Commonwealth des Etats-Unis.
Durant la guerre de Sécession, le Kentucky ne prendra pas position, et reste neutre… mais sera tout de même le théâtre de nombreux combats.
Un état plein d’histoire et de références culturelles, qui montre bien que malgré l’image qu’en a l’héroïne du roman, il y a bien des choses à garder dans cet région 🙂
Edit du 15 octobre : je n’avais pas fait attention, mais ce livre avec ses haricots fait une fabuleuse entrée pour le challenge des fruits et légumes littéraires !
Ce livre est dans ma PAL pour ce challenge ! Ton billet est passionnant et me donne envie de me plonger dans cette lecture dès que possible 🙂
N’hésite pas alors, tu vas voir du pays avec ce roman 🙂
j’ai déjà entendu parler de ce roman, et je suis curieuse de le découvrir ! Hop, billet ajouté !