« Le Maître des illusions » de Donna Tartt (Etat du Vermont)

Je savais que le challenge « 50 états, 50 billets » me réservait encore beaucoup de bonnes surprises… Mais là, pour traiter du Vermont, c’est encore plus que ça : pour moi c’est un véritable coup de coeur que ce roman !
Donna Tartt n’a écrit que 2 romans, et Le maître des illusions publié en 1992 est son premier chef d’oeuvre. Commencé alors qu’elle était à l’université dans le Vermont, elle le fait lire a son camarade Bret Easton Ellis (excusez du peu !) qui la pousse a continuer à travailler sur ce projet de roman. Il lui faudra 8 ans pour le finir…. mais quel livre !

Nous suivons l’histoire de Richard, californien de 19 ans, qui se retrouve accepté à l’Université de Hampden dans le Vermont. Une chance pour lui, qui a très peu d’argent et ne bénéficie pas de l’aide de ses parents : Hampden est le fief des fils et filles de grandes fortunes, mais il arrive à obtenir une bourse pour y étudier.
Afin de suivre son cursus de grec ancien, il réussis à s’inscrire au cours de Julian, professeur atypique et charismatique, qui n’accepte de suivre qu’une poignée d’élèves triés sur le volet par lui-même. Il rencontre alors une faune loin de ses habituelles fréquentations, de riches érudits de lettres anciennes : Henry, Francis, Bunny et les jumeaux Camilla et Charles.
Mais un drame va bientôt les conduire à commettre l’irréparable : tuer Bunny.
Qu’est ce qui va les conduire à cette situation ? Et comment vont-ils s’en sortir ? C’est ce que l’auteur nous raconte dans ce roman, sous la plume de son narrateur Richard

J’ai été totalement happée par l’histoire… et fort heureusement, les longues heures que j’ai du passer dans le train ces derniers jours m’ont permis de rester bien au chaud dans cet univers qui m’a fasciné.
Si les protagonistes sortent des milieux très aisés, on n’est pas dans le mode yuppie artificiels et puant… On est vite attaché aux différents personnages, on apprend à les apprécier ou les détester via le regard de Richard, et on se projette aisement dans l’histoire.
Le groupe d’amis de la classe de grec sont relié entre eux par d’étranges affinités. L’amour du grec et de sa culture ancienne, mais aussi de l’alcool, des drogues, des fêtes, de l’argent, de l’art et de l’inattendu…

Il y a dans la posture des personnages et dans l’écriture un truc qui m’a fait penser aux romans russes, comme ceux de Dostoïevski… Pourtant je n’en ai pas lu beaucoup, mais j’y ai pensé quand même, peut être à cause du romantisme des situations et des personnages, toujours très théâtraux, excessifs et cyniques.
Mais surtout le roman est fait de sorte de ne pas prendre le lecteur pour un imbécile : références culturelles, expliquée mais pas mâchées, réflexions philosophiques sorties des cours de grecs de Julian… de quoi pouvoir s’enrichir personnellement !
Les paysages du Vermont et de cette université qui semble perdue au milieu des forêts donne le rythme aux sensations de Richard sur cette affaire, et nous invite au voyage autant qu’elle accompagne la narration : des flamboyants et chaleureux bois en automne, il devient glacial et inamical en hiver, jusqu’à se radoucir jusqu’à devenir trop lourd en été, lorsque la verdure revient enfin.

Bref, un roman très bien construit, qui nous met dès le prologue dans le bain : Bunny sera tué, mais comment et pourquoi, ça sera ça une des intrigues de l’histoire… et à partir de là découdre fil à fil les liens qui relient les personnages, leurs objectifs et motivations… On voit dans une première partie ce qui conduit à ce drame, et dans la seconde ce qu’ils feront après sa mort.

Un gros coup de cœur pour moi, il risque de faire parti des romans que je conseillerai pendant un bon moment ! Ca m’a presque donné envie de me replonger dans du Brett Easton Ellis que j’avais abandonné, en commençant à lire sans succès American Psycho il y a 10 ans… S’il a apprécié l’œuvre de Donna Tartt, il ne peut pas être totalement à jeter 😉

Nous retournons en Nouvelle-Angleterre pour découvrir le Vermont, où se situe la fictive Université de Hampden, lieu principal des intrigues de ce roman.

Le Vermont est une région situé au nord des USA, et borde la province de Québec… Donc comme on le voir dans le roman, les hivers sont glacials, et les été chauds et humides, et avec comme le souligne le héros Richard, des automnes très colorés, du fait du changement de couleurs des arbres en rouge et doré…
Et des arbres ce n’est pas ce qui manque, vu l’étendue des domaines forestiers (77% de l’espace total), dont ceux de la région de la Montagne Verte qui courent du nord au sud de l’état. C’est d’ailleur grâce à ses pentes boisées que ces montagnes des Appalaches ont reçu l’adjectif « vert » !

Le Vermont est peu peuplé (625 000 habitants), c’est le second état le moins peuplé des Etats-Unis. Aucune ville ne dépasse les 40 000 habitants, si ce n’est Burlington… Même la capitale Montpelier fait office de village de campagne avec ses 8000 âmes !
Je n’aurais pas pensée qu’un état si proche de celui de New-York puisse abriter si peu de monde !

Côté économique, c’est l’agriculture qui fait vivre l’état : élevages laitiers et transformation en produits alimentaires, mais aussi sirop d’érable ! Et oui, on est bien à côté du Canada 🙂

Bref, tout à l’air de faire du Vermont un état propice aux loisirs centrés autour de la nature, et c’est le cas : outre les chemins de randonnées assez réputés, c’est le spot idéal pour les sports de glisse en hiver… En revanche l’ambiance doit être moins calme, car le Vermont est le lieu de villégiature préféré des grandes villes des états voisins (New-York, Boston…), attirant chaque saison plus de 4 millions de touristes hivernaux !
Autre endroit intéressant pour passer du temps proches de la faune et de la flore : le lac Champlain qui sert d’habitat à diverses espèces de poissons, oiseau, mammifères… malgré la pollution de celui-ci. Il abriterait aussi un cousin du monstre du Loch Ness, Champ !

En parlant du lac Champlain, il est intéressant de noter que celui-ci doit son nom à Samuel de Champlain, explorateur français qui a découvert le Vermont en 1609 ! Bien entendu, la région était déjà habitée par des tribus amérindiennes, Iroquois et Algonquins… Mais cela n’a pas empêché les colons français de s’établir au nord de la région, alors que les britanniques s’implantent au sud. Après le Traité de Paris de 1763 en faveur des anglais, la colonisation britannique s’accélère, et ceux-ci tentent de chasser les français de leurs terres (décidément, on s’est fait virer de partout !).
Mais le Vermont n’est alors pas encore un état à part entière, et son territoire excite la convoitise de ses voisins, l’état de New-York et celui du New Hampshire… Il faudra l’intervention du gouverneur de ce dernier pour que les frontières du Vermont soient enfin délimitées…mais provisoirement : ses limites vont changer à plusieurs reprises au court du 18 ème siècle, ce qui créera des tensions avec ses voisins, mais aussi la Couronne britannique.
Alors qu’en 1775 la Guerre d’Indépendance débute, les rivalités entre les milices des colons du Vermont et les hommes du gouvernement de New-York font rage, même s’ils participent à la révolte.
En 1777 l’état est enfin baptisé « Vermont » (pour Verts Monts… du fait de ses montagnes boisées), et devient  une république indépendante ! Avec ce nouveau statut, la situation n’est pas très simple pour ce jeune état : les Britanniques tentent de les soudoyer mais seront finalement expulsés, il y a des soulèvements de colons venant d’autres états… Finalement après accord avec son ennemi de toujours, l’état de New-York, le Vermont rejoint les Etats-Unis d’Amérique en 1791, et l’Union !

Comme l’histoire du Vermont nous le laisse supposer, la communauté francophone est plutôt pas mal représentée : bien que les britannique ai récupéré le territoire au 17ème siècle, les vagues d’immigration plus tardives ont fait venir beaucoup de quebéquois. 24% de la population aurait des origines françaises ou québequoises… même si seulement 2,5% de celle-ci parlerait français.

Bref, le Vermont est dans ma top-list des états à visiter… Je ne le connaissais pas du tout avant de lire ce roman et de rédiger ce billet, et maintenant il est dans ma liste de voyages potentiel, pour un trip rando et nature ! Avec un combo dans la ville de New-York, ça serait pas mal je pense 😀

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